John Landis : de cascadeur pour Sergio Leone aux studios Universal, le cinéaste évoque ses débuts

A l’occasion du Festival du film fantastique européen de Strasbourg qui lui rendait hommage, AlloCiné a rencontré le cinéaste John Landis (‘”Blues Brothers”), qui a accepté de se souvenir de ses débuts, notamment comme cascadeur de westerns !

John Landis n’a pas commencé sa carrière par la réalisation, il a exercé un grand nombre de “petits boulots” du cinéma : “tous sauf la coiffure ! Je ne plaisante pas !” Notre rencontre se passe dans un hôtel du centre-ville de Strasbourg, et s’il acquiesce au fait que son cinéma n’est pas facilement classable dans une case précise, il confie que son genre préféré est le western. “J’adore en regarder et j’adore en faire, c’est toujours amusant, vous êtes en extérieur, vous montez à cheval… Le réalisateur Walter Hill m’avait dit un jour “s’ils savaient combien on s’amuse à faire des westerns, ils ne nous laisseraient pas en faire” !

C’est en tant qu’acteur et cascadeur que John Landis commence à apparaître au cinéma et avec des westerns. Comment a-t-il fini cascadeur ? Sur le tournage de De l’or pour les braves (1968) sur lequel Landis est assistant de production : “un jour, le directeur de production britannique Terry Lens vient me voir avec mon ami Jimmy et nous dit “Vous pouvez tomber de cheval ?”. Jimmy répond “Mais bien sûr, nous sommes nés à cheval !” J’étais sans voix et évidemment le lendemain nous étions (il se mime galopant effrayé et hurle dans le lobby de l’hôtel) mais au final je suis devenu bon”.

Mais le cinéaste est quelqu’un de pragmatique et il avoue sans peine : “C’était une période au cours de laquelle je cherchais n’importe quel travail sur un tournage. Je ne voulais pas devenir cascadeur (…). Mais il y avait ce grand boom autour du western spaghetti et les films se tournaient en Espagne (…) à Almeria, qui était un patelin dégueulasse ! Il y avait une arène, deux pensions et un bar, il n’y avait rien d’intéressant à faire”. Le futur réalisateur du Loup-garou de Londres se souvient : “Il y avait sept villes westerns faites pour des films et qui avaient été laissées sur place, je pense qu’il en reste une. Mais tout c’était avant que le club Med ne s’installe !” Landis fait ici référence au fait que la ville western restante est aujourd’hui un lieu touristique.

Sur place à Almeria, Landis a tout fait : “cascadeur, figurant -car j’étais blanc et que j’avais les cheveux longs- et même coach linguistique !” Le rythme de tournage était fou et impliquait des gens de toute nationalité : “trois films se tournaient simultanément et il y avait des Allemands, des Français, des Américains, des Britanniques et des Italiens. Tout ces gens étaient de passage, pour des films à gros ou à très petits budgets”. En conséquence, il fallait que les comédiens tournent les dialogues en anglais, et Landis les aidait à le faire.

Leone criait beaucoup, mais je ne parlais pas italien !

A cette période, Landis tourne plusieurs films quasiment coup sur coup : “Je me souviens d’avoir été dans Soleil rouge et [l’acteur] Toshiro Mifune me transperçait de son sabre… Mais vous savez, souvent le cascadeur ne doit pas être reconnu, il double quelqu’un de connu”. Deux ans plus tard, il joue dans un film de Tonino Valerii : “dans Mon Nom est Personne, il y a cette troupe baptisée la Horde sauvage, j’étais l’un d’eux. Et c’est Sergio Leone qui a dirigé toute ces scènes de charge à cheval”. Sur le tournage d’Il était une fois dans l’ouest, il passe énormément de temps avec deux jeunes critiques de cinéma qui ont signé l’histoire sur laquelle est basée le film : Dario Argento et Bernardo Bertolucci.

Des années plus tard, alors qu’il est à New York pour regarder les rushs du jour d’Un Fauteuil pour deux avec son directeur photo, Landis recroisera Sergio Leone en train de regarder les rushs de son Il était une fois en Amérique : “Je me rapproche et je dis “Scusi signore Leone, vous ne vous souvenez sans doute pas de moi mais j’ai travaillé pour vous et je voulais juste vous saluer et vous dire quel plaisir etc” ; il ne me reconnaît évidemment pas et j’ai vu que quelqu’un lui chuchoter quelque chose et il a soudainement dit “mais bien sûr que je me souviens de vous”, il m’a fait une accolade et nous sommes allé dîner, il était charmant toute la soirée mais je sais très bien qu’il ne savait pas qui j’étais” !

De son propre aveu, Landis n’a rien appris en terme de mise en scène auprès de Young, Leone ou Valerii : “Leone criait beaucoup, mais je ne parlais pas italien (…), par contre j’ai appris la production”. Après avoir tourné Mon Nom est Personne, il signe sa première réalisateur, Schlock, le tueur à la banane, qui lui appris où étaient ses limites : “j’ai tout appris lorsque j’ai dû monter Schlock. Dans la salle de montage, j’ai compris ce que je n’avais pas : la façon de raconter des histoires en film, avec une juxtaposition d’images. (…) Autrement comme je l’ai dit, je savais à peu près tout faire. L’avantage c’est que quand des années plus tard un directeur photo m’a dit “on ne peut pas faire ça tu sais”, je lui ai répondu “évidemment que tu peux salopard de menteur  !” Je sais ce qui peut être fait ou non”.

La carrière de Landis prend un nouvel élan avec Le Loup-garou de Londres et très vite, il se retrouve dans les studios Universal ce qui en tant que fan de films de monstres aurait pu être le job rêvé. Il n’en fut rien : “Universal a une très belle histoire mais en terme de management je ne pense pas que… Regardez la façon dont ils ont foutu en l’air le Dark Universe ! Qui engage Tom Cruise dans La Momie ?! Ce ne sera pas La Momie si vous engagez Tom Cruise ! Ils ont raté cela comme ils ratent tout. Leur film Dracula était nul aussi. C’est triste”.

L’industrie est maintenant régie par la peur

Surtout, l’époque a changé et les modes de production aussi. Landis a confirmé qu’il ne se reconnaissait plus dans le style de production actuel : “Lorsque je travaillais pour Universal dans les années 70 et 80, je savais qui étaient les dirigeants de studio, je connaissais leur nom. Aujourd’hui ce sont des subdivisions d’entreprises mondiales, je ne les connais plus. Ce sont tous des hommes d’affaires qui ont des fonds spéculatifs et c’est le marketing qui dicte tout. Et cette industrie est désormais régie par la peur. Ils ne prennent aucun risque”.

La seule pensée de l’existence d’algorythmes pour écrire des scénarios le fait bondir de son siège : “C’est ridicule ! Mais ils ne font des choses pareilles que parce qu’en cas d’échecs, ils peuvent accuser l’algorithme”.

Une fois les prémices de sa carrière détaillés, notre temps avec le réalisateur était déjà écoulé. Vous pouvez néanmoins explorer d’autres pans de sa riche carrière vis nos précédents entretiens sur son travail avec Michael Jackson pour le clip Thriller mais aussi son film culte avec John Belushi et Dan Aykroyd, Les Blues Brothers.

Découvrez également la leçon de cinéma de John Landis :

John Landis Interview 2: The Blues Brothers, Cadavres à la Pelle, Le Loup-garou de Londres

 

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