Avec Pour seul cortège (Actes Sud), Laurent Gaudé livre un très beau texte autour des thèmes de la succession et de l’héritage, en l’occurrence ceux du roi de Macédoine.
L’an dernier, Laurent Gaudé publiait un puissant récit inspiré par les ravages de l’ouragan Katrina, qui s’était abattu sur la Nouvelle-Orléans. A l’heure où Ouragan paraît en poche, Actes Sud publie le nouveau roman de l’auteur de La mort du roi Tsongor, Le soleil des Scorta ou Eldorado. Pour seul cortège narre la mort d’Alexandre, mais, précise Gaudé, «ce n’est pas Alexandre le Grand, personnage historique». Ou plutôt, c’est lui, le roi de Macédoine, transcendé par l’écriture et l’énergie de l’écrivain.
Alexandre meurt, donc, et l’on s’arrache sa dépouille, son Empire, sa succession. Au cœur du chaos, surgit, tirée de sa retraite, Dryptéis, qui fut la fille de son ennemi Darius et la femme de son ami, Hephaestion. Pour seul cortège est un texte emprunt d’oralité -Laurent Gaudé est en premier lieu un auteur de théâtre- qui s’inscrit dans un aller-retour permanent entre ces deux voix. Le dialogue entre l’homme passé du côté des morts et la femme qui l’accompagne dans son dernier voyage scande cette œuvre écrite comme un chant.
Pour seul cortège se lit dans un souffle -il semble d’ailleurs écrit en un seul jet, tel cette «phrase euphorique» évoquée par l’auteur- et il faut se laisser porter par la plume épique de Laurent Gaudé pour venir à bout de cet étrange périple. «Je veux être dans la fièvre plutôt que dans le détail, précise-t-il dans sa note d’intention, tenter d’insuffler au livre une énergie chamanique plutôt que de rester fidèle à la chronique». De fait, Pour seul cortège n’est pas un roman historique mais un voyage, comme les affectionne Gaudé, dont le but est «l’exploration de la pâte humaine». L’ivresse, la danse, l’esprit de conquête, la mort, qui n’est jamais vraiment la mort, l’héritage: voici ce qu’explore ce texte inspiré, énergique, poétique. «Je veux être du côté des cavaliers du Gandhara, explique encore l’auteur, ces cinq compagnons qui abandonnent l’Empire pour embrasser l’immensité, ces cinq hommes qui quittent le réel pour plonger dans le mythe et qui le font avec ivresse.»
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«Le roman est puissant quand il est fou» estime-t-il. On ne saurait mieux dire.